Tiakola : L’Art de la Patience et de la Mélodie

La biographie de tiakola ressemble à un manuel sur l’art de la patience dans l’industrie musicale moderne. Loin d’être une étoile filante, William Mundala, né à Bondy en 1999, a méticuleusement construit sa carrière, pierre par pierre, depuis les bancs de la maternelle à La Courneuve jusqu’au sommet des charts français. Son histoire est celle d’un talent inné, façonné par un environnement culturel riche et poli par un travail acharné.

Élevé dans la cité des 4000, Tiakola est le cadet d’une grande famille de huit enfants. Cet environnement familial est sa première école de musique. Son éducation sonore est un mélange vibrant : les sonorités congolaises omniprésentes à la maison lui donnent le sens du rythme, tandis que le gospel, qu’il pratique assidûment au sein de la chorale de son église, lui enseigne la puissance des harmonies vocales. Cette fondation musicale solide lui confère une aisance naturelle pour la mélodie qui le distinguera plus tard. Mais avant que la musique ne devienne sa vocation, c’est le football qui occupe ses pensées. Passionné par le ballon rond, il y excelle, jouant au poste exigeant de latéral gauche en National. Il caresse le rêve de devenir professionnel, un rêve qu’il finira par sacrifier sur l’autel de la musique, non sans un léger regret.

La transition s’opère au milieu de l’adolescence. Avec son “groupe de potes très solides”, une véritable fraternité née sur les bancs de l’école maternelle, il commence à s’adonner aux freestyles de rap. Ce qui n’est au départ qu’un jeu va rapidement se transformer en projet sérieux. En 2015, ils créent le “4keus gang”. C’est le début d’une aventure collective qui va servir de rampe de lancement à Tiakola.

Le parcours du “4keus gang” est un exemple classique de succès “underground” qui devient “mainstream”. Voici les étapes clés de leur ascension :

  • 2015 : Formation du groupe et sortie de “Y’a bourbier”. Le clip est amateur, mais l’énergie est communicative.
  • Signature : Le groupe est repéré et signe chez MG Records, ce qui professionnalise leur démarche.
  • 2016 : Le single “Vois t’as vu” connaît un succès retentissant et les impose comme un nom à suivre.
  • 2017 : Sortie de leur première mixtape, “Vois t’as vu”, qui confirme leur popularité.

Pour Tiakola, ce succès collectif est un tournant personnel. Il prend la décision majeure d’arrêter ses études et d’abandonner définitivement ses ambitions dans le football pour se consacrer corps et âme à la musique.

En 2018, des dissensions internes mènent à une scission du groupe. Tiakola se retrouve dans la moitié qui rejoint le label Wati B. Cette période, bien que difficile, s’avère être une bénédiction déguisée pour lui. Devenant le mélodiste attitré, il est chargé de la quasi-totalité des refrains. Il peaufine son art, développe sa signature vocale et devient le visage et la voix la plus identifiable du groupe. Dès 2019, ses ambitions solo se dessinent. Il commence à accepter des featurings en son nom propre, apparaissant sur la compilation “C’est rien c’est la rue”. L’année 2021 marque son explosion en tant qu’artiste solo avant même la sortie d’un projet. Ses collaborations avec des géants comme Dadju, Naza et Gazo le présentent au grand public comme un artiste confirmé, un faiseur de tubes à la voix d’or.

Le terrain est parfaitement préparé pour l’arrivée de son premier album. “Mélo”, annoncé en avril 2022 et sorti le 27 mai, est un triomphe instantané. L’album de 17 titres est une démonstration de sa palette artistique, naviguant avec une aisance déconcertante entre rap, drill et pop. Porté par les singles “Étincelle (Maradona)”, “La Clé”, “M3lo” et “Si j’savais”, et enrichi par les présences de Gazo, Niska, Hamza, SDM et Rsko, l’album se hisse directement à la première place des charts. Le succès commercial est massif : “Mélo” est certifié disque de platine en moins de deux mois.

Ce triomphe n’est pas un accident. Il est le résultat d’une éthique de travail irréprochable. Tiakola n’est pas du genre à se reposer sur son talent naturel. Conscient que sa force réside dans sa voix, il a pris des cours de chant pour la maîtriser à la perfection. Sentant que son écriture pouvait être améliorée, il n’a pas hésité à demander conseil à Dinos, l’un des lyricistes les plus respectés du jeu. Il a appris de chaque collaboration, observant et absorbant les techniques de ses aînés. Comme il le dit lui-même dans l’intro de “La Clé” : “Avant, j’avais pas confiance en moi, mais là, p’tit à p’tit, ça va…”. Cette humilité et cette persévérance sont les clés de son évolution.

Après le carton de “Mélo”, Tiakola n’a pas ralenti. Nominé aux Victoires de la Musique en 2023, il continue d’occuper le terrain avec des clips à succès comme “Meuda” et des tournées à guichets fermés, devenant une tête d’affiche incontournable des festivals. Le “prodige de La Courneuve” a réussi sa transition, passant de membre de groupe influent à superstar solo. L’attente fébrile de son prochain album en 2024 prouve que Tiakola n’était pas seulement une révélation, mais qu’il est bien parti pour s’installer durablement au sommet du rap français.

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